J’ai le plaisir d’annoncer la soutenance de ma thèse de
doctorat
(Université de Paris 1-Panthéon-Sorbonne) :
samedi 12
juillet 2008, à 9 h, à l’INHA, Salle Vasari, 2 rue Vivienne, 75002
Paris.
Georges Farhat
L’ANAMORPHOSE
DU TERRITOIRE
Les fonctions paysagères de la perspective topographique
dans l’économie seigneuriale en France, autour de l’œuvre d’André Le Nôtre
(1613-1700)
Jury
:
Antoine Picon, Directeur d’études, Université de Paris
1-Panthéon-Sorbonne, Professeur à l’Université Harvard (directeur de
thèse)
Patricia Falguières, Professeur agrégé à l’EHESS
(rapporteur)
Monique Mosser, Ingénieur de recherche au
CNRS
Jeanne Peiffer, Directeur de recherche au CNRS
(rapporteur)
Résumé
Se référant à l’histoire des techniques et des sciences
ainsi qu’à celle de l’architecture et des villes, la critique moderne a élaboré
un double modèle perspectif et territorial des jardins français du
XVIIe siècle qui semble désormais aller de soi. Mais quelle
perspective et quel territoire y convoque-t-on alors qu’on ne prend que
rarement en compte les données matérielles et culturelles de l’application
technique au terrain ? La problématique que nous explorons se dessine, en
creux, à la croisée de trois domaines (jardins, perspective, institutions du
sol) et en deux temps : I-topographie ; II-institutions. Elle
interroge la mise en réseau de corpus et d’acteurs hétérogènes : sites et
réalisations, techniques (géométrie, perspective, agronomie), institutions
territoriales (seigneurie, juridiction, fiscalité), économie (gestion domaniale,
assise foncière).
I
— À rebours de l’herméneutique
post-panofskyenne (forme symbolique) et de son rabattement sur les jardins, nous
envisageons une perspective topographique, distincte de l’outil de
représentation graphique et indissociable de l’optique. Cette application
topographique de la perspective, nous l’éprouvons et la définissons à travers
l’étude de compositions paysagères dues à Le Nôtre et son « école ».
Nous analysons ainsi, par le calcul et le dessin, l’articulation de dispositifs
optico-géométriques, collimations et anamorphoses, au socle physique de la
géomorphologie. Nous en dégageons des pratiques singulières, hybrides et
inédites dans le corpus bidimensionnel, ainsi qu’un outil de construction des
mouvements du corps et du regard.
II —
Les
jardins du XVIIe siècle ne sauraient se comprendre sans définir le
statut et les usages des terres dévolues à la mise en œuvre de la perspective
topographique. À cet effet, nous questionnons les structures spatiales induites
par les institutions du sol. Nous élaborons une approche domaniale du paysage
construit qui prend en compte les profits et les loisirs, notamment dans le
parc. Cette entité polyvalente (lieu de production et support d’imaginaire),
distincte et complémentaire du jardin, s’avère incontournable pour comprendre
l’essor de la perspective sous le rapport
des pratiques sociales et de l’économie terrienne. En explorant, par exemple, la
constitution foncière des axes perspectifs sur la longue durée, les enjeux
fiscaux que cela suppose, les limites juridictionnelles que l’on franchit ou le
paysage in literalia que l’on
structure ainsi, on caractérise la perspective topographique comme un
espace-temps social.
Au terme de cette restitution des procédures de
formation, il devient possible de qualifier la construction d’une perspective
topographique comme une opération de transformation, par l’optique et la
géométrie, de situations territoriales, complexes et hétérogènes, et d’assiettes
topographiques accidentées en scènes paysagères ordonnées et homogènes. Soit,
une
anamorphose
territoriale.
Georges
Farhat