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Objet : Histoire des techniques
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- From: Patrice Bret <patrice.bret AT yahoo.fr>
- To: athena AT services.cnrs.fr
- Subject: [Athena] Séminaire Traduction 22 avril
- Date: Wed, 14 Apr 2010 10:17:38 +0000 (GMT)
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Centre Alexandre Koyré-Centre de recherches en histoire des sciences et des techniques
Pavillon Chevreul (3e étage), Muséum national d’histoire naturelle, 57 rue Cuvier, 75005 Paris
(métro Jussieu)
Susan Pickford, CRIDAF/Paris 13
Le statut du traducteur littéraire à l'ère du droit d'auteur
Résumé
La traductologie a connu plusieurs tournants depuis son émergence comme champ de recherches à part entière après la deuxième guerre mondiale. Après s’être focalisé sur les aspects linguistiques puis culturels, le champ s’est récemment élargi aux questions sociologiques (voir notamment les travaux récents de Gisèle Sapiro en France et de Michaela Wolf en Autriche). Or, si l’on commence à s’intéresser aux conditions gouvernant la circulation des textes traduits, le traducteur lui-même reste en grande partie invisible aux yeux des chercheurs. Nous disposons bien de quelques portraits de traducteurs/trices exceptionnels, grâce notamment à Jean Delisle, mais nous ne connaissons quasiment rien des conditions de travail des humbles traducteurs de l’ombre qui formaient la vaste majorité des effectifs de la profession, tant du côté littéraire que du côté dit “pragmatique”. A notre connaissance, le seul chercheur à s’être penché sur la question de manière approfondie est Norbert Bachleitner de l’université de Vienne. L’HTLF, projet de recherche bénéficiant d’un soutien ANR, offre l’occasion de revenir sur ces questions. Responsable du chapitre sur le statut social des traducteurs au 19e siècle, je présenterai lors du séminaire un premier état de mes recherches sur la question.
La traduction devient un enjeu pour la toute jeune république française, qui cherche la reconnaissance internationale après la Révolution. On sollicite la création de postes de traducteur auprès des comités d’instruction publique. Commence ainsi un processus de bureaucratisation de la traduction, processus poursuivi au début du 19e siècle par Napoléon, qui crée des départements de traduction au sein des ministères. On voit ainsi la mise en place progressive au cours du siècle d’un fonctionnariat de la traduction.
En même temps, les avancées techniques dans les domaines de l’industrialisation et du transport mènent au développement du commerce international ; la traduction devient ainsi un véritable enjeu commercial. On ne fera aucune différenciation entre la traduction littéraire et commerciale avant la deuxième moitié du siècle, lorsqu’émerge une législation européenne du droit d’auteur. Or, l’essor d’un lectorat populaire, stimulé notamment par des avancées techniques dans la fabrication de papier et l’imprimerie, nécessite l’alimentation permanente du marché du livre, et ce dès la fin du 18e siècle. On fait donc massivement appel aux traducteurs. En même temps, la banalisation des voyages (on est à l’aube du tourisme moderne) et la généralisation de l’enseignement des langues vivantes, dont la pédagogie passe encore largement par le thème et la version, favorise l’afflux de candidats traducteurs.
En ce début de siècle, la traduction devient donc l’objet d’une rationalisation de type capitaliste. On peut mesurer l’expansion du marché et la professionnalisation concomitante des traducteurs en traçant leur présence dans l’Almanach du commerce de Sébastien Bottin. On crée des agences de traduction dès 1810; on sous-traite ses commandes à des prête-plume besogneux, tout en criant au scandale lorsque des éditeurs indélicats font appel à des traducteurs délocalisés en Hollande; on pratique la traduction à flux tendus afin de devancer ses concurrents. Avant l’émergence du droit d’auteur, l’éditeur conserve la propriété littéraire de la traduction et en dispose comme n’importe quel marchandise. De ce fait, la traduction, même littéraire, s’apparente encore à une prestation de services de type salarial. Ainsi, c’est pour contrefaçon, et non pas pour plagiat, que Charles Gosselin porte plainte contre ses rivaux en 1830 lors de la publication d’une traduction des œuvres de Walter Scott. Gosselin aura gain de cause et touchera 2000 f de dommages et intérêts; le traducteur, Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret (payé 500 f par roman), ne touchera rien.
Nous terminerons ce tour d’horizon de la situation professionnelle des traducteurs pendant la première moitié du 19e siècle en proposant une lecture des débuts de la différenciation des lectorats à travers trois traductions du Voyage Sentimental de Sterne, publiées toutes les trois en 1841. Ces trois versions correspondent à des visions de la traduction qui situent le travail du traducteur soit dans le paradigme artisanal, soit dans le paradigme artistique. Ce sera ce dernier modèle qui triomphera dans la deuxième moitié du 19e siècle, lors de la mise en place d’un cadre juridique définissant la traduction comme œuvre de création littéraire à part entière.
Séance suivante le 6 mai (séance double, de 10 h à13 h) :
Norbert Verdier, IUT Cachan & GHDSO/Université Paris-Sud 11
Traduire et transcrire des textes dans la presse mathématique du XIXe siècle
Catherine Goldstein, CNRS-UPMC, Institut de mathématiques de Jussieu
Le rôle de la traduction entre journaux mathématiques dans le développement de la théorie des nombres au XIXe siècle
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Traduction Programme Colloque EHESS.doc
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- [Athena] Séminaire Traduction 22 avril, Patrice Bret, 14/04/2010
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