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Objet : Histoire des techniques
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[Athena] GDR TPH - Atelier-concept Technique, technologie 2, 25 janvier 2021
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- From: Liliane Pérez <liliane.perez AT wanadoo.fr>
- Subject: [Athena] GDR TPH - Atelier-concept Technique, technologie 2, 25 janvier 2021
- Date: Fri, 15 Jan 2021 22:33:45 +0100
Cher.e.s collègues
Nous vous adressons tous nos vœux 2021.
Vous trouverez-ci dessous le lien et le programme de l’atelier-concept « Technique, technologie 2 » qui aura lieu le 25 janvier 2021 (par Zoom). PDF avec résumés en anglais : https://tph.hypotheses.org/322
Lien de connexion : https://u-paris.zoom.us/j/83505911999?pwd=bEpSWm05ckFxeHo1bllnMEcxTm10UT09 ID de réunion : 835 0591 1999 Code secret : 927241
Bien cordialement, Guillaume Carnino, Liliane Pérez, Catherine Verna.
9h30 : Accueil
Session 1 – Les techniques, la vie, le sensible Présidence : Vincent Bontems (CEA, LARSIM), Perig Pitrou (CNRS/PSL, LAS)
9h45-10h30 : François Vatin (Université Paris Nanterre, IDHE.S) Technique et technologie chez Marcel Mauss Quand on évoque la notion de technique chez Marcel Mauss, on pense tout de suite à sa communication de 1934 sur « les techniques du corps » et à la célèbre définition de la technique qu’elle contient, comme « acte traditionnel efficace ». Le succès de cette formule, qui mérite une discussion critique qu’elle n’a pas toujours eue, tend à occulter la réflexion d’ensemble de Mauss sur la notion de technique et la place centrale qu’il accordait à la « technologie », comme science de la technique, dans son projet général de sociologie. Résumer Mauss à la notion de « technique du corps », laquelle vise à poser la forme élémentaire de la technique (sans instruments), laisse penser que son regard serait tourné vers le passé des sociétés humaines. Or, dans ce domaine comme dans d’autre, si Mauss embrasse le passé long de l’humanité, c’est bien pour penser les problèmes du présent. Marcel Mauss avait été initié à la notion de technique, lors de ses études universitaires à Bordeaux, par son maître Alfred Espinas, le rival de son oncle Emile Durkheim, auteur en 1897 d’un ouvrage sur Les origines de la technologie. En 1941, déjà malade, il consacre à ce thème sa dernière communication « Technique et technologie », texte testamentaire, dans lequel il manifeste, en ces temps difficiles, sa foi dans la civilisation. Cet exposé vise à restituer la cohérence d’ensemble de la réflexion de Marcel Mauss sur la technique et sa portée toujours actuelle.
10h30-11h15 : Nathan Schlanger (École des Chartes/PSL) Eclectisme technologique chez André Leroi-Gourhan Autodidacte revendiqué, Leroi-Gourhan (1911-1986) se voulait le bâtisseur d'une discipline nouvelle, la « technologie » (primitive, comparée, préhistorique ou encore culturelle). En m'appuyant sur des sources publiées et archivées, je vais tenter de retracer les aléas de cette technologie, des années 1930 aux années 1960, depuis ses origines ethnologiques auprès du musée de l’Homme et jusqu'à ses déclinaisons biologiques dans Le Geste et la parole. Ce cheminement sera mis en résonance avec d'autres préoccupations techniques et technologiques dans les sciences humaines et sociales du XXe siècle.
Pause
11h30-12h15 : Timothée Deldicque (EHESS-Centre Alexandre Koyré/ COSTECH) Les apports de la critique canguilhemienne du schéma « applicationniste » entre science et technique pour penser la possibilité d’une « mise en science » des techniques La critique du schéma « applicationniste », d’après lequel les techniques ne seraient que des applications pratiques de théories scientifiques, peut être considérée comme un geste fondateur commun à la constitution de la philosophie, l’histoire, l’anthropologie et la sociologie des techniques au XXe siècle, et donc, potentiellement, d’une technologie en sciences humaines. Pour ces disciplines, ce schéma empêche de comprendre le rôle des techniques dans l’expérience et les sociétés humaines. Cette critique apparaît constante dans l’œuvre du philosophe Georges Canguilhem et a pu servir de référence pour des acteurs des disciplines déjà cités. Elle est notamment au centre de deux textes de jeunesse (« Descartes et la technique », 1937 et « Activité technique et création », 1938) encore peu étudiés. Ces textes, comme quelques autres plus classiques de Canguilhem s’inscrivant dans la perspective de l’élaboration d’une philosophie biologique des techniques, mettent en lumière la dimension synthétique des techniques et leur irréductibilité analytique. À partir de leur lecture, j’essayerai d’ouvrir quelques pistes de réflexion afin de comprendre les difficultés que peuvent rencontrer les projets de « mise en science » des techniques. Pour ce faire, je m’appuierai – sans pour autant limiter ce matériau historique à l’analyse philosophique de Canguilhem – sur mon travail de thèse en cours concernant l’introduction de l’éducation technologique à l’école moyenne (1944-1985) et la méthode pédagogique de l’analyse technique.
Pause déjeuner
Session 2 – Des catégories au prisme de la Modernité Présidence : Arnaud Dubois (École Nationale Supérieure d’Art de Limoges, HT2S), John Krige (Georgia Institute of Technology, Atlanta) 13h30-14h15 : Ludovic Coupaye (University College London) De la « technologie » comme concept hasardeux à la « technologie » comme catégorie vernaculaire Cette présentation s’appuie sur l’analyse critique historique de la « technologie » comme concept hasardeux (L. Marx 2010, Schatzberg 2018), et sur la tradition anthropologique maussienne, pour une analyse de son rôle comme catégorie analytique en anthropologie. Comme tel, « technologie » est utilisé pour renvoyer à des pratiques et des objets observés dans des contextes ethnographiques très variés et des échelles très différentes, de la poterie à l’écriture voire l’imagination, de la reproduction humaine à la politique, des propulseurs et téléphones mobiles aux infrastructures. Ce faisant, « technologie » occupe la même position ethnocentrique que d’autres catégories, telles que la Nature ou la Société, qui elles ont fait l’objet de critiques et de déconstruction au cours des dernières décennies. On posera donc « technologie » comme étant une catégorie vernaculaire de la (post)modernité qui, outre d’agir comme une boîte noire, écrase par son contenu hégémonique les catégories vernaculaires « non-Modernes ». Puis on esquissera comment, en soumettant la « technologie » à la même critique faite à d’autres catégories « Modernes », il devient possible de révéler ethnographiquement le rôle central des techniques dans la construction des mondes sociaux.
14h15-15h : : Prakash Kumar (Pennsylvania State University) Technicalization: American Aid and Agricultural Universities in India This paper addresses a range of discrete efforts to set up agricultural universities in India in the 1950s and 1960s with American aid. The first such university came up at Pantnagar during the Second Five Year Plan and six more at Ludhiana, Udaipur, Jabalpur, Hyderabad, Bangalore and Bhubaneshwar during the Third Five Year Plan. The US-India collaboration was generally celebrated in India as a project to break away from the British system of agricultural research institutions that India had inherited through its colonial experience. My paper addresses this collaborative effort between American agronomists and development planners and Indian educators, scientists and policymakers as an effort that was geared towards building an epistemic and infrastructural edifice through a fresh infusion of expertise. In calling this endeavor “technicalization” this paper brings attention to the new institutions, to professionalization and to identity and narratives that were launched in an ever-expanding agrarian arena. This new regime sought to legitimize itself through technicalization of skill and work. The hubris of technic in such a scenario allows access to the interplay of skill, body, and worth that can get relegated as “pre-technology” in the object-focused historiography of technology. La technicisation : L’aide américaine et les universités agricoles en Inde Cet exposé traite d’une série de tentatives particulières visant à créer des universités agricoles en Inde dans les années 1950 et 1960 avec l’aide des États-Unis. La première université de ce type est apparue à Pantnagar au cours du deuxième plan quinquennal et six autres à Ludhiana, Udaipur, Jabalpur, Hyderabad, Bangalore et Bhubaneshwar au cours du troisième plan quinquennal. La collaboration entre les États-Unis et l’Inde a été généralement célébrée en Inde comme un projet visant à rompre avec le système britannique d’institutions de recherche agricole dont l’Inde avait hérité par son expérience coloniale. Mon article traite de cette collaboration entre les agronomes et planificateurs du développement américains et les éducateurs, les scientifiques et les décideurs indiens comme un effort visant à construire un édifice épistémique et infrastructurel grâce à un apport neuf d’expertise. En appelant cette entreprise « technicisation », cette présentation attire l’attention sur les nouvelles institutions, la professionnalisation, l’identité et les récits qui ont été lancés dans l’arène agricole/agrairienne en constante expansion. Ce nouveau régime a cherché à se légitimer par la technicisation des compétences et du travail. L’étude de l’hubris technique dans un tel scénario permet d’accéder à la relégation des interférences entre habiletés, techniques du corps et valeur sociale ont pu être considérées comme une « pré-technologie » dans une historiographie ds techniques centrée sur les seuls objets.
Pause
15h15-16h : Joshua Grace (Department of History, University of South Carolina) The “Shock of the Old” in Post-Independent Fundi Terminology: Lexicons of Doing, Knowing, and Learning in Adult Education Manuals in Tanzania, 1960s – 1980s When Tanzania gained independence in 1961, many international development and education policymakers thought the new nation lacked scientific and technical languages. Such assumptions drew from colonial-based perceptions that African societies had never—or not yet—formed practices and knowledge one might categorize as “science” or “technology.” Kiswahili linguists subsequently attempted to create new technical languages suitable for citizens whom the state had marked as targets of sociotechnical change—stressing a need to create more knowledgeable, and thus productive, citizens in the name of nation-building. One such effort, Istilahi za Ufundi wa Magari (Terminology of Car Mechanics), translated every part of the motor vehicle into Kiswahili for application in adult night classes. This huge undertaking overlooked a key feature of car repair in the country: mechanics had long accepted English words for car parts—for example, carburetor becoming carbureta—while using Kiswahili verbs of doing, knowing, and learning East African societies had used for centuries. Locating such Kiswahili verbs in technical manuals made primarily for adult night education programs, this paper leans back into much longer histories of fundi terminology. Fundi, a noun, denotes mastery of a range of tasks from divination, carpentry, tailoring, or car repair to soccer playing, music, and farming; ufundi refers to bodies of knowledge and practice. Neither carries the dichotomies of “technology” or “science,” and they thus find more resonance with histories of “technique” and “techne.” Yet, in some cases after independence, Tanzanian writers translated ufundi as “technology” even as they tied both terms (ufundi and “technology”) to nation-building efforts. This paper explores the enduring presence of Kiswahili verbs of knowing and doing from deeper pasts in post-independent adult education—a sort of “shock of the old” for independent nation building. It then speculates about some implications of understanding “technology” as a Kiswahili translation of ufundi instead of approaching it as a colonial or developmentalist borrow that needs a Kiswahili equivalent. « Quoi de neuf » dans la terminologie Fundi post-indépendante : lexique de l’action, du savoir et de l'apprentissage dans les manuels d’éducation des adultes en Tanzanie, des années 1960 aux années 1980 Lorsque la Tanzanie a accédé à l’indépendance en 1961, de nombreux responsables du développement international et de l’éducation pensaient que la nouvelle nation manquait de langues scientifiques et techniques. Ces hypothèses s’inspiraient de conceptions issues de la colonisation selon lesquelles les sociétés africaines n'avaient jamais - ou pas encore - mis en place des pratiques et des connaissances que l’on pourrait qualifier de « science » ou de « technique ». Les linguistes kiswahili ont ensuite tenté de créer de nouvelles langues techniques destinées aux citoyens que l’État avait désignés comme acteurs du changement socio-technique, soulignant la nécessité d’avoir des adultes plus informés, et donc plus productifs, au nom de la construction de la nation. L’une de ces tentatives, le manuel Istilahi za Ufundi wa Magari (Terminologie de la mécanique automobile) a proposé de traduire en kiswahili toutes les pièces des automobiles pour les cours du soir pour adultes. Cette énorme entreprise a négligé un élément clé de la réparation automobile dans le pays : les mécaniciens avaient depuis longtemps accepté les mots anglais pour les pièces de voiture - par exemple, carburateur devenant carburta - tout en utilisant les verbes kiswahili de faire, savoir et apprendre que les sociétés d’Afrique de l’Est utilisaient depuis des siècles. En repérant ces verbes kiswahili dans des manuels techniques conçus principalement pour les programmes d’éducation des adultes, cet article se penche sur l’histoire beaucoup plus longue de la terminologie fundi. Fundi, comme nom, désigne la maîtrise d’une série de tâches allant de la divination, de la menuiserie, de la couture ou de la réparation de voitures au football, à la musique et à l’agriculture ; ufundi fait référence à un ensemble de savoirs et de pratiques. Aucun des deux ne porte la dichotomie incluse dans « technologie » ou « science », ils trouvent donc davantage de résonance avec « technique » et « techne ». Pourtant, dans certains cas, après l’indépendance, les écrivains tanzaniens ont traduit ufundi par « technologie » alors même qu’ils liaient les deux termes (ufundi et « technologie ») aux efforts de construction de la nation. Cet article explore la présence durable des verbes kiswahili de savoir et de faire issus d’un passé profond dans l’éducation des adultes post-indépendance - une sorte de « choc de l’ancien » pour la construction d'une nation indépendante. Il interroge ensuite certaines implications de la compréhension de la « technologie » comme traduction en kiswahili de ufundi au lieu de l'aborder comme un emprunt colonial ou développementaliste qui aurait besoin d'un équivalent en kiswahili.
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- [Athena] GDR TPH - Atelier-concept Technique, technologie 2, 25 janvier 2021, Liliane Pérez, 15/01/2021
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