dans le cadre du séminaire d’Histoire des techniques de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, de
, au Centre Malher (amphithéâtre, M° Saint-Paul), Patrice Bret viendra présenter:
Culture visuelle et savoirs du praticien : l’artiste, ingénieur et inventeur Nicolas-Jacques Conté (1755-1805), médiateur des techniques entre Orient et Occident.
Patrice Bret (Centre Alexandre Koyré, UMR 8560 du CNRS/EHESS-MNHN, Labex HASTEC)
Les savoirs des ingénieurs sortis de Mézières, des Ponts-et-chaussées ou de Polytechnique à la fin du XVIIIe siècle sont bien connus, mais ceux des nombreux individus qui se qualifiaient ou étaient qualifiés d’ingénieurs sont plus difficiles à cerner. En soulignant la porosité, la dynamique et l’hybridation des savoirs entre des espaces disciplinaires et géographiques, on évoquera ici, à travers des sources iconographiques et manuscrites publiques et privées, souvent inédites, la figure d’un ingénieur et artiste comme intermédiaire des techniques entre l’Orient et l’Occident.
Tout à la fois peintre et géomètre (moins de formation que par profession), puis chimiste et mécanicien, N.-J. Conté fut surtout ingénieur praticien et inventeur. Formé d’abord par la curiosité, l’observation et l’expérimentation manuelle puis par les livres, cet autodidacte fut poussé ensuite à décloisonner les domaines et à innover pour répondre aux défis posés par le contexte – terrain et événements. Son nom est d’abord attaché à l’invention du crayon à mine artificielle (la seule de ses nombreuses inventions qu’il breveta) et éventuellement à l’aérostation militaire, qu’il créa, au Conservatoire des arts-et-métiers, dont il fut l’un des fondateurs, et à la monumentale Description de l’Egypte dont il fut le premier à diriger l’édition au retour de l’expédition de Bonaparte. Habitué à associer au regard du peintre le coup d’œil et l’intelligence technique de l’ingénieur, il fut chargé d’étudier les arts et métiers égyptiens et de diriger les ateliers mécaniques du Caire qui ont introduit les techniques européennes en Egypte pendant l'occupation française. Il s’attacha, sur place et à son retour en France, à décrypter, dépeindre et décrire les savoirs en œuvre dans les machines, les outils et les gestes des Egyptiens. Sa lecture des savoirs tacites locaux le conduisit même à les valoriser en prônant parfois un transfert à rebours de l'Orient vers l’Occident.
Bien cordialement,
Valérie Nègre